Les stratégies Multicanal, Cross-canal et Omnicanal sont présentées depuis plusieurs dizaines années (notamment depuis 2007 avec la sortie du premier iPhone) comme des mesures de survies imposées aux marques pour faire face à une dangereuse mutation de leur environnement.

Les consommateurs sont à l’origine de ces mutations profondes : ils ont pris le pouvoir et ont changés leur modes de consommations. Le client est mobile, ultra-connecté, habitué à l’instantané et extrêmement volatil. Avec lui c’est « Je veux tout, tout de suite, mais quand je veux, ou je veux et avec qui je veux. »

Le défi des distributeurs a donc été de créer de nouveaux points de contact en phase avec ces nouveaux clients exigeants.

Dans cet article je vous propose de faire le point sur ces stratégies Multicanal, Cross-canal et Omnicanal et d’observer ensemble quels sont les challenges auxquels vous serez confronté au cours de votre aventure.

Définition du Multicanal, Cross-Canal et de l’omnicanal

Un canal de distribution ne peut plus seulement être défini comme un vecteur de vente, mais doit être défini comme un point de rencontre et d’échanges avec vos consommateurs dans leur parcours d’achat. Chaque canal est un moment privilégié avec votre prospect, dans lequel vous devrez lui proposer une expérience unique et personnalisée. Rappelez-vous que c’est le consommateur, qui a choisi de vous retrouver à cet endroit, et il a de très fortes attentes vous concernant, si vous le décevez il ira voir vos concurrents.

Qu’est-ce que le multicanal ?

Le multicanal est l’utilisation de plusieurs canaux de distribution indépendants pour commercialiser un produit ou une offre de service. Le multicanal n’est pas nouveau, en 1681 lorsque la librairie parisienne Lutetiae Parisiorum, décide de publier 6 catalogues de vente en plus de son magasin, elle fait d’ores et déjà du marketing multicanal.

Le principal défaut des stratégies de marketing multicanal est que généralement chaque canal de distribution vise un segment particulier de consommateur. Ces canaux travaillent en silo indépendamment des uns et des autres, l’objectif étant d’éviter la cannibalisation.

Dans un monde où les consommateurs choisissent leurs modes de consommation, cette logique de protection des canaux n’est plus viable, d’autant plus qu’une étude de 2011 réalisée par le cabinet Deloitte UK dévoile que les « consommateurs multicanal » sont plus fidèles et dépensent plus que leurs homologues « monocanal ».

Le passage au cross-canal

Le Cross-canal est la réponse logique aux limites du modèle multicanal. Le consommateur ne veut plus avoir de différence entre les canaux. Du moins, il souhaite que chaque canal lui propose une expérience unique et adaptée à son mode de consommation.

Vos canaux vont donc collaborer et l’objectif du service marketing est d’optimiser les synergies entre les canaux. Il faudra traduire vos campagnes promotionnelles sur tous les canaux en créant pour chacun, une expérience unique visant à fluidifier le parcours du consommateur. Le consommateur va utiliser chaque canal pour vivre une aventure avec votre marque et vos produits, toute coupure dans cette belle aventure sera vécu comme un échec par le consommateur. A l’inverse vous pouvez lui faire vivre une expérience inoubliable : votre consommateur entre dans votre boutique,  votre vendeur en lui demandant son nom et son prénom ouvre sa fiche sur une tablette, lui propose alors un coupon réduction de 6% parce qu’il a 6 ans d’ancienneté et ce coupon est automatiquement envoyé sur le téléphone du client. Pas si compliqué à mettre en oeuvre et le résultat pour le client est bluffant.

L’exemple du Click’n Collect est un très bon exemple de stratégie cross-canal où vous utilisez les synergies d’un canal pour en renforcer un second. Votre client a acheté sur internet, mais votre boutique offre des avantages énormes comparé au site internet : vous pouvez faire vivre une aventure réelle à vos clients. Vous pouvez par exemple faire écouter de la musique sur la nouvelle enceinte qu’il vient de récupérer, lui faire découvrir un nouvel artiste au passage et surtout votre vendeur peu lui donner de bons conseils sur l’utilisation de son enceinte.

L’idéale stratégie Omnicanal

L’omnicanal est le nec plus ultra de la relation client. Grâce à la puissance croissante des nouvelles technologies et la possibilité de collecter et traiter en temps réel des quantités énormes de données, vous pouvez ne créer qu’un seul canal de distribution : le consommateur. Peu importe où il se trouve, ce qu’il veut ou quand il le veut, vous avez toujours une expérience à lui proposer. Il veut acheter sur son téléphone, dans la boutique où il vient d’essayer le panier qu’il avait commencé sur sa tablette dans son canapé hier soir ? C’est faisable, et en plus le vendeur lui a proposé une nouvelle expérience en réalité augmentée lorsqu’il est entré dans la boutique.

Dans ces stratégies, le client est le canal et votre marque s’adapte à ses envies et impératifs d’achat : il n’y a plus aucune coupure entre les canaux et votre meilleur atout est la « data ».

Une stratégie omnicanal est la fusion des canaux de distribution et donc la disparition des silos marketing (et des équipes en silos ?), permettant ainsi d’avoir une vision 360° du client et proposer une expérience d’achat inégalée où l’ADN de votre marque prend tout son sens.

Vous pourrez retrouver le terme SO-LO-MO, qui est la base d’une bonne stratégie omnicanal : un consommateur est SOCIAL – LOCAL et MOBILE.

omnicanal

Exemple d’une stratégie omnicanale réussie

J’imagine que vous connaissez tous le fast-food Burger King. Pour son déploiement en France, la marque a eu l’idée de profiter de son lancement et des files d’attentes monstrueuses que son retour en France allait provoquer pour lancer un petit jeu mobile dont le principe est très simple.

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Vous devez protéger votre repas contre une horde de zombies et pirates affamés qui veulent vous piquer votre pitance.

L’idée est géniale parce qu’elle touche clairement la cible jeune de Burger King et plus encore les ultra-connectés qui vont faire de la publicité sur les réseaux sociaux. Grâce à cette application ils transforment un problème (attendre) en un défi pour les consommateurs, en faisant entrer le digital dans le restaurant physique.

Et là où ils sont malins, c’est qu’une application est un moyen extrêmement simple de récupérer énormément de données sur votre consommateur. D’ailleurs, si vous vous connectez à l’application de Burger King voici ce qu’ils vous demandent comme informations :

  • Votre localisation
  • Vos nom et prénom
  • Votre Age
  • Votre sexe
  • Vos réseaux sociaux
  • et ils vous demandent de pouvoir partager sur votre réseaux.

Et toutes ces informations, ils les collectent avec un seul clic sur un bouton « OK » de votre part.

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Pour rester dans l’omnicanal ils ont bien entendu utilisé des caisses électroniques mais ils ont surtout joué la carte des réseaux sociaux à 100%

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A l’heure ou j’écris ces lignes je n’ai pas réussi à décrocher mon fast-pass, le secret pour gagner un fast-pass Burger King serait de garder son menu plus 1 min 40s et pour cela il faudrait jouer à plusieurs sur une tablette, c’est malin car le buzz est alors augmenté, les joueurs cherchent des solutions pour gagner, ils découvrent qu’il faut essayer à plusieurs et donc autant de menus Burger King achetés.

N’hésitez pas à m’envoyer vos screenshots si vous avez réussi à décrocher un fast-pass ! 

Les challenges d’un projet multicanal, cross-canal ou omnicanal

Un projet de transition digitale et de stratégie omnicanal est un projet long, et bien souvent difficile car il va impacter l’ensemble des services de l’entreprise.

Vous passerez par 3 phases :

  • Vendre l’idée en interne et réussir à dépasser les résistances opérationnelles et culturelles ;
  • La mise en place du projet technique avec une profonde transformation de la DSI à prévoir ;
  • Faire adhérer et former les équipes de ventes.

Tout un programme sympathique, dont, vous vous en doutez, la réussite dépendra de votre capacité à mobiliser une bonne équipe projet.

Pour la première phase, vous devrez vous attaquer à la politique de gouvernance de l’entreprise : un projet omnicanal est bien souvent une évidence pour le comité de direction, mais ça l’est beaucoup moins pour les équipes opérationnelles qui vont devoir se réorganiser et accepter de nouvelles règles. Prenons l’exemple de la répartition des lignes budgétaires : un projet omnicanal intègre la triptyque : marketing, DSI et sales, et chaque service a d’ores et déjà validé ses dépenses et ses objectifs. Est-ce le marketing, l’équipe d’innovation ou la DSI qui doit payer pour le développement du site internet et les équipes de développeurs à venir ? De la même façon, est-ce que le décideur est quelqu’un de la DSI, du marketing ou d’un service spécifique ?

Bref vous l’aurez compris, vous allez vous amuser quelques mois.

Ensuite vient le projet technique en lui même, et là vous allez vous heurter aux DSI traditionnelles qui sont habituées aux longs projets d’intégration et aux grosses bases de données très complexes. Ils sont totalement à l’opposé des équipes digitales dont vous aurez besoin qui seront agiles, créatives et entreprenantes. Votre digitalisation doit être fluide et vous devez pouvoir sortir une nouvelle application dans le mois… Allez en parler avec votre DSI pour voir sa réaction.

Une fois que la DSI aura adopté le projet il faut faire attention que ce ne devienne pas non plus leur « projet geek », avec des ambitions technologiques trop loin des réalités marketing qui doivent rester simples et en phase avec l’attente de vos buyers personas.

Une fois le projet lancé, votre prochain défi est l’adhésion et la formation des équipes de ventes. Il faut bien comprendre que ces nouveaux canaux, aussi « cool » qu’ils sont pour les équipes marketing, sont des concurrents directs pour les vendeurs en magasin ou sur le terrain : « Pourquoi j’irais perdre du temps à renseigner un client qui vient du site internet alors qu’il va probablement commander en ligne et je ne toucherais aucune commission. Surtout que ce consommateur étant lui même omnicanal, a passé plusieurs jours à se renseigner sur son produit et en sait probablement plus que moi sur le domaine. »

C’est une réalité, les consommateurs viennent de plus en plus en magasin pour « casser du vendeur » car ces derniers n’ont pas les outils pour répondeur à leur attente : une bonne expérience. Vous devez donc impliquer les vendeurs et en faire des ambassadeurs de la transformation en modifiant leur rôle au quotidien. De même, vous devrez mettre en place un modèle d’attributions qui récompensera autant le marketing que le vendeur lors d’un achat multicanal. Dans le cas contraire, vous devrez gérer une forte concurrence entre vos canaux.

Dernier défi, bien réel : vous assurer que votre logistique est prête à répondre aux enjeux de l’omnicanal.

Conclusion

Ces projets passionnants doivent être pilotés par des équipes pluridisciplinaires créatives et ayant les moyens de véritablement agir sur l’organisation de l’entreprise. Votre objectif doit être de relever le niveau d’expérience des consommateurs, car en leur faisant vivre des expériences vous vous connectez directement à leur esprit et à vous pouvez ainsi « dé-rationnaliser » l’acte d’achat. Sans rentrer dans des explications qui sont hors de mes compétences, on sait tous qu’une expérience exceptionnelle nous « shoot » à la dopamine, un neurotransmetteur qui rend heureux, qui fait que l’on se sent bien et qui à haute dose créé les addictions (ne rêvez pas vous n’aurez pas 50 clients dopés à votre marque devant votre magasin chaque matin, quoique… Apple… bref.).

Quoi qu’il en soit, même si je reste persuadé que c’est un phénomène qui va exploser avec les nouvelles innovations telles que la réalité augmenté, il faut garder en tête que le chiffre d’affaires du e-commerce ne représente que 10% de celui du retail. La place du magasin physique n’est donc clairement pas remis en cause, et va probablement se renforcer dans les années à venir avec les boutiques 2.0.

Un article devant se terminer un jour, je ne peux pas vous parler d’Apple et sa productivité record en boutique grâce à l’omnicanal ou encore du flagship Store Burberry de Regent Street, mais je serais ravi de venir échanger avec vous sur vos projets à venir !

Florian Pouvreau
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